À PROPOS DU FILM «SALOPE JE T'AIME»

 

Le cinéma a convoqué plusieurs fois la salope pour raconter la ruse, la femme fatale, celle qui allait prendre le pouvoir sur l’homme.

 

« Touche pas au grisbi, salope » crie, en serrant les dents, Francis Blanche dans le film de Lautner « Les tontons flingueurs » sur des dialogues d’Audiard. 

 

Et ce scénariste et dialoguiste ne s’est pas privé d’offrir des textes tels que « Tu es une belle salope, mais je t’aime », comme un mot doux susurré par un cruel caïd ou pour décrire un homme traitre « Ah, le Didier, c’est une belle salope ». « Salope » appliqué ici à la gente masculine, comme un synonyme de traitrise. 

 

Bedos, dans sa période « one man show avec personnage » s’écrie, en cherchant dans les pages d’un magazine comme « Lui »… « Où elle est passée ma salope ? Où elle est ??? ». En opposition à « la mémère » de la maison. 

 

La salope de cinéma et des « one man show » est souvent jetée à la tête du spectateur comme un fantasme. En opposition à la maman raisonnable. De nombreux films italiens ont d’ailleurs souvent impressionné sur la pellicule des personnages masculins lançant une phrase proche de « Toutes des salopes, sauf ma mère ».

 

Toujours dans le cinéma italien, le grand cinéaste du genre giallo : Lucio Fulci n’hésite pas pour donner tout l’exotisme et la sauvagerie à son film de l’intituler : « Les salopes vont en enfer ».

Après ce petit panorama de cinéma s’emparant du mot et de l’esprit de la salope, venons en à notre démarche :

 

Après « Salauds de pauvres » expression bien familiarisée et acceptée, il nous a semblé intéressant de partir dans l’aventure d’un film encore plus risqué, intitulé « SALOPE, JE T’AIME », réalisé par 11 femmes.

 

« SALOPE JE T’AIME » veut réunir 10 récits avec le regard uniquement d'auteures / réalisatrices.

 

Ce titre peut faire dresser les cheveux sur la tête, surtout à l’époque de « Balance ton quoi ??? », Mais c’est un contrepied malicieux qui est lancé ici aux spectateurs.

 

Rappelez vous !!! En 1971 du « Manifeste des 343 salopes ». 

Ces femmes avaient décidé de revendiquer haut et fort cette expression pour imposer le droit à l’avortement et enfin disposer de leur corps.

 

Un cri de révolte, de contre-culture contre l’ordre bourgeois et conservateur.

 

C’est pourquoi il faut voir les récits de « SALOPE JE T’AIME » à l’aune de ce manifeste, mais aussi dans l’exploration de la femme dite salope ou fatale dans le cinéma. Sans aucune logique naturaliste. 

 

Comme une créature que l’on ne peut pas saisir. Et par conséquent… Libre… 

 

Dans une époque comme la nôtre où la posture, la fuite de la pensée poétique laissant la place à la « com. » de bas étage, où les libertés sont de plus en plus réduites, frisant la dictature molle, faire un film comme celui ci peut être l’antidote de tous ces maux.

 

Depuis la naissance du cinématographe, devant nos yeux, la femme dite « salope » s’est imposée pour gagner du terrain sur un monde d’homme. Et l’on voit dans les années 40 qu’Ida Lupino s’intéresse aux méandres de la salope dans les films noirs jusque dans les années 80 où Christine Pascal s’intéresse à la garce (extension de la salope ?).

 

En citant ces deux scénaristes/réalisatrices à des époques différentes, c’est dire que les femmes ont voulu prendre à bras le corps ces appellations et rechercher quelque chose de profond avec le cinéma comme moteur lumineux.

 

Nous pouvons dire qu’aujourd’hui un relais va être pris par 11 auteures/ réalisatrices pour mettre en image les déclinaisons de « SALOPE JE T’AIME ».

 

Il y aura même une fulgurance sur ce thème à partir d’une chorégraphie

 

Montre qu’au-delà des mots, il s’agit aussi de corps lorsque l’on parle de salope… On vous l’a dit la salope comme le manifeste cité ci-dessus veut s’exprimer avec tout son être et dépasser le verbe.

 

Ce titre est audacieux et chatouille l’oreille pour mieux faire comprendre qu’il va s’agir d'émancipation de femmes, d’homos, de transgenres dans un monde d'hommes très masculinisé.

 

Un titre qui se permet d'écouter les désirs. Ceux des femmes. Il ne devrait rien y avoir de choquant, là-dedans. 

 

Ce thème de la salope a rarement été abordé d'un point de vue féminin dans notre cinéma, contrairement à des tentatives faites par les hommes de façon affligeante.

C’est un objet cinématographique libre que nous voulons lancer avec ce film aventureux. 

 

Quelque chose qui renverse les clichés et les stéréotypes. Puisque les quatorze histoires vont naitre sous le regard uniquement de femmes.

 

Bien sûr que l'envie de provoquer n'est jamais bien loin. Mais au delà de l’électrochoc de cette expression c’est un désir de bien mettre les points sur les i en toute liberté avec une certaine transgression des normes et des moeurs d'une moralité judéo-chrétienne.

 

Tout ne sera pas blanc ou noir. Des thèmes complexes seront explorés. Nous montrerons subtilement ce qui anime nos personnages. Les pulsions de vie vont être exposée en toute simplicité, faisant ressortir une beauté presque palpable.

 

Le sexe sera abordé de front. L’humour sera présent.

 

Enfin un film qui s'intéresse au plaisir féminin en montrant pas « les choses vraies », mais « vraiment les choses », sans tout enrober de morales douteuses.

 

Un film pour faire changer un tant soit peu les mentalités sur le plan personnel, collectif, affectif et cinématographique.

 

Un désir de se libérer de l’emprise masculine, voilà ce que ce « SALOPE JE T’AIME » va faire surgir.

 

Si les femmes salopes dans le cinéma manifestent un comportement brutal et manipulateur, c’est parce qu’elles désirent prendre leur revanche sur les hommes. La plupart des hommes, qu’ils soient mari ou protecteur, n’aiment pas réellement leur compagne. Ils la désirent, ou selon leur propre expression, ils sont « fous » d’elle. La salope les obsède, ils veulent à tout prix la gagner par orgueil masculin, pour montrer leur puissance. La femme est alors réduite à un faire-valoir dont la beauté doit se refléter sur eux.

 

Revenons au panorama cinématographique.

 

Rappelez vous comment le film noir s’attachait à mettre en scène des femmes dites « salopes » qui avaient raison de recourir à la force ou à la ruse. Car les hommes étaient cruels, violents, machistes. La salope représentait une attaque envers la femme traditionnelle et son environnement. En effet, elle refusait d’être la femme dévouée et la mère aimante que la société glorifiait. 

 

Avec « SALOPE JE T’AIME », C’est une aspiration à cette liberté que l’on va raconter à travers ce film. La salope qui manipule les hommes pour parvenir à ses fins ne fait donc qu’utiliser les uniques armes qu’on lui laisse pour exercer un minimum de pouvoir.

 

Elle ne fait que rejoindre les revendications féminines des dernières décennies à savoir l’égalité des salaires, l’égalité des chances et l’égalité des droits.

 

Les salopes de « SALOPE JE T’AIME » lancent donc un appel à l’émancipation.

 

En définitive, la salope comme mes chères réalisatrices utilise la finesse, la perspicacité, la séduction et l’intelligence pour s’imposer dans un monde d’hommes, elle évolue en fonction des fantasmes du public masculin et de la position de la femme dans la société. 

 

« SALOPE JE T’AIME » va plus conquérir le public que l’effrayer. 

 

À aucun moment les portraits sont négatifs. Ce sont les conditions d’existence qui le sont. 

 

Sortir du rang, c’est déjà être une salope. 

 

Je vous l’ai dit c’est un film de contre-culture. Cinquante ans après 1969, année érotique et de toutes les bascules en bien et en mal.

 

 

Frédéric Marboeuf

 

 

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